Changement de programme [PV Daisu](14/01/2018)

Encore une fois, la réaction de Miss Lucy Taylor fut plus que satisfaisante. Même le plus idiot des hommes ne pouvait pas rater qu’elle était en pleine incompréhension. D’un côté, c’était tout de même compréhensible. Je lui fis un petit sourire tout en sirotant mon verre avant de faire un signe de tête de la tête.

« C’est carte n’est pas fausse. Je te t’en assurer sur ma propre vie. »

Je commençais à regarder un peu partout. La conversation commençait à être trop… surnaturelle et un éclair de lucidité me rappela que n‘importe qui pouvait entendre ce qu’on disait. Déjà comme ça, j’avais bien trop joué avec la demoiselle. Et je lui avais déjà donné trop d’information. Personne dans cette ville à part les quelques lycans que je connaissais et cette fameuse et non moins charmante Ruby Ookami ne connaissait ma véritable nature. Et je n’avais pas envie que quelqu’un le découvre.

J’avais repris un air très sérieux, comme si j’avais brutalement dessaoulé de tout l’alcool que j’avais pu ingurgiter jusque-là. J’étais en alerte. Après avoir vérifié que personne ne semblait m’écouter que je suis approché de Lucy pour reprendre ma vieille carte d’identité et lui murmurer quelques mots.

« Plus sérieusement, oublie mon âge et cette discussion. Si tu insistes à ce sujet, sache que tu fonces tête baissée dans quelque chose de plus étrange et dangereux que tu puisses penser. »

J’espérais avoir été clair et ferme sur le coup. Je n’avais clairement pas envie de me retrouver à tout lui expliquer. Cependant, quelque chose me disait qu’elle n’allait certainement pas en rester là. Je devais avoir le cœur net là-dessus. Sans lui laisser le temps de répondre, je finis mon verre avant de sortir de quoi payer le barman.

« Gardez la monnaie ! »

Je me levais alors sans trop de difficulté, aussi surprenant que ça puisse paraitre avant d’adresser un au revoir à Lucy :

« Bien ! Je te souhaite une bonne soirée, Taylor ! A une prochaine… On ne sait jamais ! »

Je pris tout mon temps pour sortir afin de lui laisser le temps de réagir. Si elle tenait réellement à poursuivre cette conversation, elle allait certainement me suivre. Ça allait me permettre de la mener dans une petite ruelle tranquille où on ne risquait certainement pas d’être dérangés. Une fois dehors, je pris encore le temps pour marcher. J’aurais voulu vérifier tout de suite si elle se trouvait derrière moi mais ça n’aurait pas été discret de me retourner sans raison. J’avançais dont dans la petite ruelle avant de m’adosser à un mur et d’allumer une clope en attendant.

Comme je le craignais, elle s’était jeté dans la gueule du loup, tête baissée. Elle se tenait là, bras croisés et confiante. Je recommençais à rire. Une véritable crise, cette fois. Il aura fallu quelques minutes pour que je récupère mon sérieux. Une fois fait, je m’allumais une nouvelle cigarette, ayant lâcher la première sans le vouloir.

« Je ne t’avais pas prévenu que tu te jetais la tête la première dans quelque chose de dangereux ? Franchement, je me dis que tu as de la chance d’être tombé sur moi. Sinon, à l’heure qu’il est, tu ne serais déjà plus de ce monde. C’est une constatation, pas une menace, bien sûr. »

Je tirais sur ma clope et je relâchais un nuage de fumé dans le froid de la nuit. J’étais en train de me dire que je commençais à être content de l’avoir croisé ce soir. Bon, la pauvre n’avait pas franchement l’air de tenir à sa vie mais elle n’avait bien changé les idées pour le coup. Et puis qu’on en était là, autant voir jusqu’à quel point elle était… « suicidaire ».

« Dis-moi… Il y a-t-il des choses auxquelles tu crois ? Penses-tu qu’il existe des humains doués de capacités étranges ? Penses-tu qu’il existe des créatures surnaturelles qui se cachent parmi nous ? Penses-tu qu’il est possible qu’une personne ait 40 ans alors qu’elle en parait vingt ou penses-tu que je te mène en bateau depuis tout à l’heure ? »

Je me demandais à quel point elle était ouverte d’esprit. Après tout, les loups-garou, les vampires, les monstres, Kitsune, Kappa, médiums, voyants, Kami… Il y avait toutes sortes de croyances. Et je me doutais que ce n’était pas exclusif au Japon. Si nous avions nos propres croyances, pourquoi les étrangers n’en auraient pas ? J’attendais clairement d’avoir son avis là-dessus avant de reprendre :

« Bon… Et si j’ai réellement 40 ans, pourquoi n’ai-je l’air que dans avoir 20, pour toi ? »

Je me doutais que je devais l’emmerder avec mes questions. Mais si elle avait décidé de me suivre, elle irait là où j’en aurais envie. Je n’avais pas envie de me transformer devant elle sans raisons et sans savoir comment elle pourrait réagir. Du coup, elle devrait trouver la réponse d’elle-même. Et quand bien même elle l’aurait trouvée… Je ne savais vraiment où ça allait nous mener mais j’avais envie de le découvrir !

Erf… Je n’avais pas particulièrement apprécié sa réponse. Surtout qu’elle ne m’avait pas répondu, au final. Si ses seules réponses étaient que je me foutais d’elle ou que j’étais fou. Non, je ne l’étais surement pas. Trop alcoolisé et du coup en avoir trop dit, je l’admettais. De toute façon, je n’étais certainement pas le premier con à en dire trop une fois qu’il avait un de trop dans le nez. Quoi qu’il en soit, je ne pouvais pas revenir en arrière. Et je n’avais pas envie de prolonger la conversation et d’en dire plus, maintenant.

« Alors, oui, tu es folle. Et je m’étonne que tu ne sois pas encore morte à l’heure actuelle. Je suppose que tu as aussi une chance insolente avec tout ça. Je vais renouveler une nouvelle fois mon conseil : Oublie-moi. Oublie cette maudite conversation dans le bar. Ravale ta fierté et mets de côté ta stupide curiosité à moins que tu ne tiennes pas à ta vie. »

Cette fois-ci, je me tenais clairement en face d’elle.

« Il y a des choses qu’il vaut mieux ne pas savoir. Si je n’étais pas venu dans cette ville, mes parents ne seraient certainement pas morts et ma vie serait certainement pas ce qu’elle est aujourd’hui. »

Mon cœur me serra. J’avais l’impression de trahir Asuna en disant ceci. Je continuais mon monologue avec un pointe de tristesse dans la voix et une larme à l’œil. Dire que j’avais changé mes idées en parlant à cette étrangère. Voilà que je repensais à ma meute, à ce qu’elle était devenue et au fait que j’étais toujours ici, sans nouvelles d’Asuna et Heiji et sans la moindre solution pour les ramener près de moi.

« Je n’ai pas que des regrets, bien sûr. Il y a eu des bons moments. J’ai eu de la chance dans mon malheur. »

Je me sentais à nouveau mal. J’étais maintenant complétement sobre, j’en étais sûr, et un mélange de sentiments négatifs faisaient le grand huit. Tristesse, colère, désespoir… Je n’avais plus qu’une envie : retourner dans mon lit et dormir profondément jusqu’à demain. C’est soirée d’anniversaire était officiellement la pire que je connaisse. Je me retournai pour prendre congé.

« Ne me suis pas, je ne suis pas d’humeur pour t’en dire plus. Si tu veux vraiment en savoir plus, tu devras chercher par toi-même. Je souhaite juste que tu ne perdes pas la vie parce que tu en sais maintenant trop. »

Et ainsi, je commençais à marcher vers le bout de la ruelle.

Je m’étais arrêté quand elle eut repris la parole. J’avais envie de rire mais pas d’un rire franc et chaleureux comme j’en avais l’habitude quand j’allais bien. Non, C’était un rire jaune, ironique, mauvais. Il ne fallait pas que je me morfonde et que je broie du noir ? Je me retiens de justesse de lui sauter dessus. Cette fois-ci, la colère parlait. Et si je l’écoutais, j’étais déjà transformé et littéralement sur elle. A la place, je me contentais de mordre violemment dans mon bras. La douleur me calma aussitôt. Décidément, Curieuse et mêle-tout. Cette pauvre fille n’avait rien pour elle ! Je suppose que je payais aussi mon comportement dans le bar, aussi. Que je détestais le Karma… Si je pouvais tout simplement lui mordre un bon coup dans l’arrière-train, je l’aurais fait immédiatement. A la place, je me retrouvais avec un bras en sang. Pas grave, ça allait vite guérir.

Elle avait fini son monologue chiant. Elle n’allait donc pas tenir compte de mes remarques et foncer droit dans un mur. J’avais envie d’être là pour voir sa tête le jour où elle allait tout découvrir. Je savais que ce n’était plus qu’une question de temps, maintenant. Je me contentai d’hausser les épaules, le bras toujours sanguinolent.

« Fais comme tu le sens, Miss Taylor. Mais ne viens pas pleurer : Je t’ai prévenu ! »

Sans lui laisser le temps, de rajouter quoique ce soit, je me suis mis à courir le plus vite possible. Je n’avais pas l’intention de prolonger plus longtemps cette discussion. J’avais toujours envie de lui mordre le cou. Une fois sûr et certain qu’elle n’avait pas pu me suivre, je rentrais calmement à mon appart. Je me déshabillais et je jetais un rapide coup d’œil à mon bras, la maudissant à haute voix. La morsure était cicatrisée maintenant mais des traces de sang séchés se trouvaient tout le long de mon bras. Un passage rapide sous l’eau me permit d’enlever les coulées, ne laissant que des marques distinctes de mes dents. Je savais que ce ne serait plus là d’ici demain, heureusement. Mais ça m’emmerdait royalement. En ouvrant le frigo, je me rappelai du pourquoi je m’étais retrouvé dans un bar à en dire trop à une sombre inconnue. Je maudissais encore cette soirée. Sans plus attendre, je m’allongeai de tout mon long dans mon lit. Le sommeil, contrairement à ce que je pensais, ne tarda pas à me gagner et je m’enfonçais dans un sommeil agité.