Une prière dans le noir [24/06/2018]

Le religieux explicita son raisonnement, rendant la demoiselle dubitative. Oui, c’était une façon de voir les choses. C’était peut-être vrai. Peut-être pas. La demoiselle n’avait pas assez vécu pour en avoir la preuve. Comme elle ne prouvait prouver que tous les saints et émissaire n’étaient pas des vampires. Bien trop long, contraignant. L’inverse était plus simple, d’ailleurs. Et puis, cela expliquerait les miracles qu’il put y avoir dans le passé. Si les saintes écritures étaient réelles. Après tout, ce n’était surement pas un humain qui aurait pu ouvrir une mer en deux. Peut-être un sorcier. Mais cette idée ne vient à l’esprit de la demoiselle, puisqu’elle ignorait encore et toujours leur existence. Tout ça pour dire que c’était possible. Elle n’en était pas convaincue. Mais cela restait une possibilité.

Quant à la perfection. Oui, elle avait été un peu idiote de parler de ça. Mais il était coutume de croire que Dieu était parfait. En fait, les propos du père la firent sourire. Si un de ses semblables l’entendait maintenant, il en ferait surement une crise cardiaque. Elle ne regrettait pas d’être venu le trouver ce soir. Il était, actuellement, comme une légère flamme qui venait éclairer et dissiper l’obscurité de ses doutes.

Il en était de même au sujet du seigneur Ryan. La demoiselle était restée droite et avait fait de son mieux avec la responsabilité qui lui était tombé dessus et ses faibles connaissances de ce qui se passait ici, à Nakanoto. Et puis, elle voulait s’investir et faire ce qui, pour une fois, lui semblait juste. En fait, plus elle passait de temps ici, et moins elle était cette gamine superficielle. Elle murissait avec le temps. Il ne serait d’ailleurs pas étonnant de la voir vieillir un peu dans les prochains mois pour l’extérieur reflètent le changement qui s’opérait à l’intérieur d’elle-même. Elle devait se faire confiance. Même si la perspective de se retrouver seule avec Junya Ryan ne l’enchantait guère. Elle ne se sentait pas prête pour cela et ne le serait certainement pas le moment venu. Peu de chance pour que toutes ses craintes et doutes soient dissipés d’ici-là.

Sarah ▬ « Vous avez peut-être raison. Ce n’est pas… impossible, je dirais. Si cela doit arriver, je tâcherais de faire au mieux. Je ne sais ce que l’avenir me réserve. Rares sont ceux qui le savent d’ailleurs. Je ne les envie pas, d’ailleurs. Cela doit être triste de n’avoir aucune surprise.

Et vous avez surement raison. Je tâche toujours de trouver un haras afin de reprendre l’équitation. Je finirais bien par en trouver un non loin d’ici. »

La demoiselle fit une courte pause. Elle réfléchissait à ce qu’elle pouvait encore dire ou demander. Mais rien ne lui venait à l’esprit en cet instant. Ce qui était fort dommage. Cette conversation lui faisait du bien. Si elle devait être objective, elle ne pouvait le nier. Après, rien ne l’empêchait de revenir par après. Ou même de venir assister à la messe. Peut-être que ceci aussi lui ferait du bien.

Il était toujours vraiment complexe de venir en aide et de prodiguer des conseils à une ou un vampire pour plusieurs raisons évidentes. Déjà, la première était tout simplement la différence d’expérience de vie entre nous. Je ne connaissais pas vraiment cette demoiselle, mais des maigres informations que les chevaliers pouvaient bien avoir sur elle et sa famille, elle avait déjà au deux fois mon âge sûrement. Ensuite, il y avait la différence de style de vie, car la grande majorité des vampires qui sont à Nakanoto y sont depuis l’installation de leur Sénat et sont des résidents de circonstance, là en tant que représentant aristocratiques. Enfin, la nature même des vampires faisait qu’ils étaient très différents des humains et donc leur point de vue également.  

La difficulté dans ce que je faisais donc était d’ouvrir son esprit pour entrevoir leur souffrance et la comprendre en redescendant à un niveau humain. Cette demoiselle avait des doutes, à cause de son éducation et de ce qu’elle voyait du monde, c’était dans mes capacités de le comprendre. Toutefois, il ne faut jamais brusquer les choses pour un vampire. Le raisonnement à court terme d’un vampire peut se faire sur plusieurs mois, rarement dans l’instant. Ils ne sont pas vraiment pressés dans la vie.  

Elle avait visiblement entendu mes mots et conseils. Il ne sert à rien de s’inquiéter pour quelque chose d’aussi peu probable qu’un procès d’intention. Si elle commençait tout juste sa carrière de sénatrice, il n’y avait derrière une invitation de son chef de clan, rien à craindre si d’aventure cela se faisait. Tout au plus, il pourrait lui demander de soutenir ses actions lors de plaidoiries futures.  

Je la gratifiais d’un sourire alors qu’elle semblait un peu plus rassurée qu’en arrivant ici. Je m’étonnais de pouvoir autant aider les gens parfois. Lorsque j’entends d’autres prêtres travaillant au japon, dans les grandes villes, cela n’a pas l’air d’être le cas. Pus le temps passe et plus je me dis que je dois vraiment être un prêtre méritant la trique. Mais s’il y a un grand projet derrière l’univers, alors le fait de désobéir ou non en fait partie, de fait, pourquoi devrais-je changer la personne que je suis ou les mots que je prononce ? Si nous n’avons que l’illusion du choix dans la vie dès notre naissance et que tout s’enchaîne, selon un plan, selon un ordre mathématique supérieur, peu importe, alors je ne suis plus là pour faire un choix, mais pour le comprendre.

Riku ▬ J’espère que vous vous sentez mieux. Plus sereine qu’en arrivant. Je ne vois pas de raison pour vous inquiéter pour cela. Il y a déjà bien assez de bonnes raisons de le faire ces temps-ci pour ne pas vous rajouter cela.  

Quant à votre envie d’équitation, je suppose que c’est très faisable. Je ne sais pas quelles sont les relations entre clan de vampires, mais je sais que le domaine du seigneur Dwight Hodgkin a des chevaux. Je suppose donc qu’ils doivent être dans un haras local lorsque le domaine ne reçoit pas ses propriétaires.  

J’espère vraiment que vous avez pu vous aider Lawford-san. Vous vouliez me parler d’autre chose peut-être ?

Je posais la question plus pour la politesse qu’autre chose, car je la sentais quelque peu apaisée et prête à s’en retourner loin de l’église.  

Quelle rencontre vraiment très intéressante...

Le religieux conclut parfaitement le sujet. Elle était plus sereine, oui. Elle ne pouvait pas avouer qu’elle ne s’inquiétait plus. On ne pouvait se débarrasser ainsi de ce sentiment en claquant des doigts. Mais elle avait une piste à explorer et un travail sur elle à faire. Cela allait prendre du temps. Mais les ténèbres en elle allait surement finir par se dissiper et elle en sortirait grandie.

Il lui parla aussi de Bradley Dwight Hodgkin. Il était vrai que c’était un véritable cowboy. Par conséquent, ce dernier devait surement faire de l’équitation de temps en temps et devait en posséder quelques-uns. Mais était-ce une bonne idée de lui demander. Ce dernier n’avait aucune raison d’accepter. Surtout qu’ils ne faisaient pas partie du même clan. Qu’allait-il dire ou faire en voyant la miss devant sa porte ? En plus, elle se souvenait bien encore de son comportement avec Jess qu’elle avait trouvé un peu déplacé. Le vampire n’allait pas l’air de s’inquiéter des règles de la bienséance. Une discussion entre les deux seraient… particulières. Mais elle nota tout de même l’information. Si jamais, au besoin. Peut-être se renseigner un peu avant de tirer des conclusions trop hâtives. Voilà que son éducation reprenait le dessus. Encore une preuve que changer ne serait pas si simple.

Sarah ▬ « Pensez-vous que le seigneur Dwight Hodgkin serait d’accord de me laisser emprunter de temps en temps l’un de ses chevaux pour une ballade ? J’avoue que je connais peut de chose sur lui, à part les on-dit et ce que j’ai pu voir lors de sa présence au Sénat. Cet homme a l’air… »

Rustre. C’est le seul mot qui lui venait en tête. Mais cela lui semblait particulièrement impoli et elle ne voulait pas se le permettre. Après, cela ne pouvait être qu’une façade, comme le masque de glace qu’arborait d’habitude la demoiselle. Les apparences étaient trompeuses. Et elle avait actuellement tendance à croire que les autres levels A étaient pire que ceux qu’ils montraient, à une ou deux exceptions près.

Sarah ▬ « En tout cas, je vous remercie pour votre lumière, mon père. Je n’ai plus de question pour le moment. Pour le reste, maintenant que vous m’avez indiqué un chemin, il est grand temps pour moi d’avancer. »

Et c’st un chemin qu’elle ne pouvait faire accompagner. Le plus dure serait de faire le premier pas. Puis de ne pas s’en écarter, simplement. Cela ne serait pas facile. Mais il le fallait pour un mieux. La demoiselle se leva avant d’ajouter quelques mots.

Sarah ▬ « Je n’ai hélas pas d’autres sujets à aborder avec vous. Je souhaite toutefois alors l’occasion de vous revoir, mon Père. De préférence pour une occasion plus joyeuse ou moins sérieuse que le décès d’un lycan ou une pleine introspection. »

Elle s’inclina dans une révérence gracieuse, comme on lui avait appris à faire.

Sarah ▬ « Je vous souhaite une bonne fin de soirée, mon Père. Prenez soin de vous. »

Et sur ces mots, avec un très mince sourire aux lèvres, elle quitta le lieu de receuillement, le cœur un peu plus léger.

Elle semblait quelque part apaisée par notre conversation et apporter du réconfort en est autant pour moi à chaque fois. C’est de voir certaines âmes ressortir aussi tourmentée qu’en entrant qui me chagrine le plus dans ce métier, mais ce genre de rencontre et de conversation que nous venions d’avoir suffisaient à redonner espoir.  

La question de savoir si le vieux Dwight Hodgkin allait accepter une telle demande était vraiment complexe. Ce vampire millénaire, je n’en savais que ce que sa protégée, Archet-san m’en disait lorsqu’elle venait quérir une aide religieuse auprès de moi ainsi que ce que j’en avait lu dans les dossiers des chevaliers des ombres.  
Il a la réputation d’un véritable tyran sanguinaire à ne pas chercher à approcher auprès de beaucoup de vampires, mais c’est aussi pas mal ce que certains proches à lui sont capable de penser par moment. En outre, les chevaliers des ombres œuvraient de façon réduite aux États-Unis pour une raison étrange d’après ce que j’ai compris de collègues de longue date au sein de l’organisation.  

Alliéné... voilà le mot que j’aurais utilisé pour conclure sa phrase. Il se dit qu’on mesure la dangerosité d’un vampire à l’âge qu’il a une fois qu’il a passé les deux cents ans à cause. Le sénat les aurait dissuadés de se tuer entre eux. Mais du coup pour un vampire comme lui ou Shidara, ayant un âge défiant la logique... A quel point pouvaient-ils bien être dans danger à prendre avec la plus grande des précautions ?

Riku ▬ Je me garderais bien, Lawford-san, de faire des pronostics avec ce vampire. Pour être honnête, ne l’ayant vu pour la première que le soir où ce cadavre de lycan a été trouvé, je ne saurais dire. Toutefois, je pense qu’Archet-san qui vit ici très régulièrement saurait vous donner des réponses à vos questions.  

Avancé sur un chemin incertain, mais avec la conviction d’aller enfin de l’avant, voilà ce qu’il faut à tout le monde. Une direction à suivre. J’étais heureux d’avoir pu lui venir en aide. Elle est vraiment charmante cette demoiselle.

Riku ▬ Oh mais vous connaissiez déjà la direction Lawford-san, je n’ai fait que dissiper tout au plus le brouillard pour le révéler à vous.  

Être un guide, ce n’est pas forcément de montrer la voie à suivre, mais plutôt de faire en sorte que la personne cherchant à être guide découvre par elle-même le chemin en se trouvant elle.

Riku ▬ Ce n’est pas grave Lawford-san, j’ai été heureux de pouvoir vous aider, même un peu. L’Eglise ne ferme plus ses portes depuis que j’en ai la charge, alors revenez quand vous voulez entre ses murs pour réfléchir. Et si vous avez besoin de parler à nouveau, vous savez qu’il n’y a qu’un prêtre ici qui fait les messes de minuit.

Je disais cela avec le plus grand et avenant des sourire avant que nous ne nous saluions pour nous dire au revoir.

Riku ▬ A vous aussi ma fille, prenez soin de vous, bonne chance à vous sur le chemin que vous avez décidé d’emprunter.  

Je la regardais quitter les lieu avant de m’en retourner à ma déambulation entre les banc de l’église, regardant les vitaux et profitant de l’incroyable sérénité du lieu...